Cendrillon ne se doutait pas des projets malveillants de son Avatar.
Pour le moment, les pieds plongés dans une bassine d'eau salée préparée par les soins de Giselle, elle discutait avec son amie. Elle lui racontait les répétitions du matin, ses difficultés, ses faux pas, les humiliations du Maître de la danse, les moqueries de ses camarades et leur dédain. Les larmes traçaient des sillons disgracieux sur les joues de la jeune fille et son rimmel coulait abondamment, formant des cernes noirs autour de ses paupières. En la voyant on aurait eu du mal à reconnaitre en cette fille échevelée et abattue la splendide épouse du Prince. La grâce et la délicatesse avaient disparus. Cendrillon renifla, accepta le mouchoir en papier que la main secourable de Giselle lui offrait et se moucha bruyamment. Contrariée de sa faiblesse momentanée, Cendrillon répéta encore une fois la même chose.
« J'ai bien entendu, Giselle ! Il disait que je n'étais qu'une empotée ! Moi, qui avais la réputation d'être une excellente danseuse au Palais, voire la meilleure parmi les courtisanes !
- Allons ! Ne vous mettez pas dans tous vos états, lui conseilla Giselle. Ce qu'il vous faut ce sont quelques cours de danse, histoire de prendre confiance en vous et être fin prête pour la générale du spectacle. Vous avez suffisamment de talent pour y arriver.
- Vous le pensez vraiment ? demanda pleine d'espoir Cendrillon.
- J'en suis convaincue. Seulement, il faudra travailler plus durement. Un effort supplémentaire s'impose, sinon ils prendront quelqu'un d'autres à votre place et vous vous retrouverez au chômage.
- Mais comment faire ?
- Laissez-moi m'occuper de cela. Il suffit de passer deux-trois coups de fil. Pendant ce temps, débarbouillez votre visage. Je reviens dans un instant. »
Giselle disparut dans sa chambre.
Cendrillon se leva en soupirant, essuya ses pieds meurtris par des heures interminables d'exercices, alla s'enfermer dans la salle de bains. Elle se démaquilla soigneusement, se lava, se brossa les cheveux qu'elle attacha en une tresse, mit une confortable robe de chambre et alla s'installer devant la télé en attendant que Giselle termine ce qu'elle avait à faire. Cette dernière, le téléphone dans une main, une friandise dans l'autre, appela des vieilles connaissances et quelques amies qui étaient encore dans le circuit. Elle expliqua, discuta, parlementa, négocia, déploya des trésors de patience et, enfin, triomphante raccrocha le téléphone et alla trouver sa protégée qui se morfondait devant sa série préférée « Malcolm ».
« Tout est réglé ! Mon ami Isa, vous prend en charge dès demain soir. Au programme, petite remise en forme, endurance, leçons de danse. Et maintenant, au lit, si vous voulez être en forme. »
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