L'immense voilier du Hollandais volant se dressait entre ciel et eaux, silhouette fantomatique et solitaire. Aucun mouvement à son bord. Un silence inhabituel régnait sur tout le navire. Un sentiment de malaise gagna les passagers du canot lorsqu'il se profila à quelques mètres d'eux. Personne ne parlait. Plus on s'approchait du vaisseau, plus le silence paraissait étrange et inquiétant. Ceux qui tenaient les rames poussèrent plus fort afin d'arriver rapidement à destination. On s'approcha enfin du bâtiment et tout le monde tendit l'oreille pour capter les bruits habituels qui auraient accompagné cette approche. Rien ne bougea.
Le canot avec le Capitaine et ses compagnons à son bord, manoeuvra vers une échelle de gros cordage qui, pendue sur le flanc à tribord, se balançait aux mouvements des vagues produisant un bruit sinistre. Le Hollandais attrapa l'échelle, et se hissa sur le pont le premier. Il récupéra l'amarre, fixa le canot au navire pour le stabiliser et aida ses amis à monter à bord. Le Pêcheur arriva le dernier tenant fermement sous son bras Platon. Le groupe s'avança avec précaution guettant un danger qui pourrait se tapir dans un coin ou derrière un amoncélèment d'objet. Chacun retenait son souffle et on s'efforçait de ne pas faire grincer les planches du pont. Lentement, ils se dirigèrent vers la cabine de pilotage où avec surprise on constata qu'il n'y avait personne. Personnes sur le gaillard d'avant. Personne sur le gaillard d'arrière. On inspecta le pont inférieur, les cabines, les câles. On ne trouva âme qui vive. Dans le livre de bord, apparaissait la date de la veille, la température de l'air et de l'eau mais aucun événement notable.
Autour du Capitaine, Phyllis, Océane et les autres attendaient qu'il parle. Seul l'homme embarqué sur le littoral se tenait à l'écart, ne faisant pas parti du groupe.
- Quel est ce nouveau coup du sort ?
- Je ne sais quoi penser. Nous avons fouillé le bateau de fond en comble. Les barques de sauvetage sont à leur place. Tout paraît à sa place.
- Un nouveau coup de la Sirène ? osa le Cracheur de feu.
- Comment le savoir ? Elle est notre ennemi depuis que le Pêcheur lui a échappé. Mais pourquoi elle attaquerait mon équipage ? Le faire disparaître ? Dans quel but ?
- Pour nous empêcher de partir d'ici, tout simplement !
- C'est une possibilité, admit le Capitaine. Mais n'y aurait-il pas une trace ? Comment s'est-elle prise ?
Ils se plongèrent dans leur réflexions. Voilà qui était incompréhensible. On mesurait l'absurdité de la situation. Cependant, le Hollandais ne resta pas inactif.
- Quoi qu'il en soit, dit-il, nous devons vérifier le navire et apporter les réparations nécessaires si nous le pouvons. Puisque vous êtes ici, poursuivit-il en s'adressant à l'homme du littoral, nous n'allons pas rester les bras croisés.Venez avec moi.
Il donna des ordres aux deux marins qui restaient, chargea le Pêcheur de les aider à décharger leur provisions, et bientôt tous les hommes s'activèrent en vue de réparer les dégats de la tempête. Phyllis, Océane et Platon furent consignés dans leur cabine avec la récommendation de sortir uniquement lorsque le Capitaine lui-même viendrait les chercher. Les deux fillettes obéirent et quelque temps plus tard on entendit à nouveau une activité sur le navire. Ce fut l'occasion pour le petit Chaperon rouge de chercher son miroir enchanté.
- Aide-moi à chercher, s'il te plaît Océane. Nous devons retrouver le miroir. Il pourra sûrement nous aider à comprendre ce qui s'est passé sur le navire durant notre absence.
Le deux petites filles se mirent à explorer minutieusement la cabine, vidèrent d'abord leurs sacs, puis les rayons d'un petit placard, regardèrent sous le lit, entre les couvertures.
- Je crois que je l'ai laissé la haut, dit à la fin de leurs recherches infructueuses Phyllis. Il faudrait monter et regarder si je n'ai pas oublié le miroir dans la pièce commune.
- Non, Phyllis ! Tu as entendu le Capitaine. Nous devons rester ici jusqu'à ce qu'il vienne nous chercher !
- Il ne saura pas que nous sommes sorties, la rassura son amie. Juste le temps de récuperer le miroir.
Malgré ses rétiscences, Océane n'eut d'autre choix que de suivre Phyllis dans la salle commune. A chaque pas, elle craignait que le Capitaine ou quelqu'un d'autre ne les surprît. Cependant, elles arrivèrent sans encombre jusqu'à la salle commune et s'efforcèrent de trouver rapidement l'objet magique. Elles inspectèrent tous les endroits où le miroir pouvait se cacher. Tout à coup, Phyllis qui s'était mise à quatre pattes pour mieux regarder sous les meubles, se hissa sur ses jambes.
- Je l'ai ! cria-t-elle triomphante en brandissant au dessus de sa tête l'objet convoité. Il avait glissé sous la banquette.
Soulagée, Océane suivit son amie dans leur cabine où Platon guettait leur retour avec anxiété. Tranquillement, ils patientèrent jusqu'à ce que le Capitaine et le reste de l'équipe vinrent les chercher.