- C'est ainsi que les personnages que nous suivons depuis un moment déjà grâce à Phyllis le petit Chaperon rouge, arrivèrent en terre inconnue. Leur navire n'était plus en état de reprendre la mer et ils ne savaient pas comment ou quand ils allaient le réparer. Ils étaient fatigués du voyage après une tempête terrible ne se doutant pas que la Sirène hostile, cherchait toujours leur perte. Ils avaient suivi le petit garçon sans vraiment poser de questions et ils pensaient que si des difficultés venaient à surgir, ils pourraient faire face grâce à la solidarité et leur ingéniosité. Du moins, c'était de cette manière qu'ils avaient procédé jusqu'à ce jour. Mais l' histoire prend désormais un nouveau tournant, dit le vieux Bombyx aux enfants-vers du mûrier. C'est à l'instant où nous baissons la garde que l'ennemi choisit pour attaquer.
Lorsque les personnages entrèrent dans le hangar, le sol se mit à trembler, la lumière disparut et tout devint sombre. Comme sortant des parois de la pièce, un souffle chaud les enveloppa et ils furent obligés de s'agripper les uns aux autres pour ne pas tomber. Ils se sentirent soudain soulevés du sol. Le souffle autour d'eux s'intensifia formant un tourbillon qui les emporta avec une rapidité extraordinaire et les projeta sur une surface lisse et dure. Ils leur fallut un bon moment pour retrouver leurs ésprits. Le premier à se mettre debout fut le Capitaine. Le temps de s'habituer à la semi-obscurité qui régnait dans l'endroit, il vérifia que tout le monde était là sans dommages.
- Que s'est-il passé ? Où sommes-nous ?demanda le Cracheur de feu.
- Je ne sais pas. Mais j'ai bien l'intention de le découvrir, répliqua le Capitaine en jetant un coup d'oeil autour. Il semblerait que nous sommes dans une sorte de caverne naturelle.
- Un moment, j'ai cru que nous allions tous mourir étouffés par la chaleur. Je n'arrivais plus à respirer ! s'exclama Phyllis.
- Tu devrais d'abord attacher Platon à avec une ficelle, lui conseilla le Capitaine. Le Cracheur doit avoir ce qu'il faut dans sa besace.
- Heureusement que nous n'avons pas perdu nos affaires !
Il fouilla et sortit d'une des poches de son sac une bobine de grosse ficelle et, coupant un bout le tendit à Phyllis.
La petite fille attacha Platon. Puis, suivant les instructions du Capitaine, en file indienne, ils se mirent en route. Le Capitaine marchait devant, suivit du Pêcheur. Puis venait Océane, Phyllis qui tenait Platon par la ficelle, le Cracheur de feu, et les les deux hommes de l'équipage qui étaient descendus du bateau avec le Capitaine.
- Où est passé le garçon ? chuchota au bout d'un moment Océane à son amie.
- Je crois qu'il n'a jamais eu de petit garçon répliqua Phyllis. C'était un leurre pour nous attirer dans cet endroit. Dieu sait ce qui va arriver maintenant.
- Crois-tu que la Sirène est responsable de notre situation ?
Phyllis ne répondit pas et personne ne parla. Ils n'avaient pas le coeur à discuter. Ils avaient tous la même idée. La Sirène avait provoqué la tempête et avait fait en sorte de les attirer dans ce lieu horrible qui sentait le moisi afin de les laisser périr lentement de faim et de soif.
Ils marchèrent longtemps. Phyllis perdit la notion de temps, ses jambes commençaient à la faire souffrir, parfois elle trébuchait sur des pierres et peinait à suivre. Elle souhaitait que le Capitaine fît une pause pour qu'ils puissent se reposer, mais n'osait pas le demander. Elle avait faim et soif et Platon qui tirait sur sa corde ne facilitait pas la tâche. Elle serait prête à abandonner si les autres ne continuaient à avancer. Tout à coup, la lumière du jour s'intensifia. D'un geste de la main, le Capitaine s'arrêta, et le Pêcheur vint se heurter à lui. Ils levèrent la tête. Ils étaient enfin sortis de la caverne. Maintenant devant eux, à perte de vue s'étendait une vallée arborée et verdoyante.
Le jour déclinait lorsque le vaisseau du Hollandais volant approcha des côtes françaises. Le bâtiment avait à peine contourné le cap de la pointe de la Bretagne lorsqu'un vent violent se leva et l'on se serait cru aux portes de l'enfer. La mer qui jusque là était calme devint furieuse. D'énormes vagues vinrent frapper les flancs du navire, faisant craquer toute la construction. L'écume des crêtes aqueuses déferlaient sur le pont supérieur le rendant glissant et dangereux. Avec d'infinies précautions, l'équipage s'activait pour ramener les voiles et tenir la barre droite. La visibilité était réduite au minimum et un brouillard enveloppa le grand voilier qui paraîssait flotter dans le néant.
Lorsque la Sirène comprit que son énigme fut résolu, elle se mit dans une rage telle, que son corps perdit son aspet d'albâtre et toute sa peau s'affubla d'une couleur irisée dangereuse qui mit en fuite toute créature vivante à des mètres à la ronde.