Les grands projets du Cracheur de feu, n'enchantèrent pas Platon, qui était convaincu de la dangérosité de l'artiste. Mais il ne voulait pas gâcher la joie de Phyllis, alors il se tut et fit comme si tout allait bien. La petite fille s'amusait à jouer à la corde à sauter et ne tarda pas à être fatiguée.
- Pourquoi n'irions nous pas vers le port ? dit le Cracheur de feu. Nous pourrions trouver quelque chose à manger et regarder les navires qui partent pour la lointaine Europe.
- Oh ! je ne suis jamais allée en Europe, s'exclama Phyllis. Je crois même que je n'ai rien visité à part mon école et la méthiathèque de mon quartier. Voyez-vous, maman ne voulait pas que je m'éloigne seule de la maison à cause des dangers de la ville. Allons au port. Peut-être qu'en la lointaine Europe, nous trouverons plus facilement ce que nous cherchons.
- Oui, mais il faudra convaincre d'abord un capitaine de nous prendre à bord de son vaisseau.
- Trouvons le capitaine et je me charge de le convaincre, répliqua Phyllis.
Ils se mirent en route et vers le soir, les trois compagnons, arrivèrent au port de la ville et décidèrent de dîner dans une gargote vers les docks. Ils passèrent commande et s'intallèrent près de la fenêtre d'où ils pouvaient contempler les navires en partance.
Leurs regards furent attirés par un magnifique vaisseau à trois mats qui chargeait en vu de prendre la mer.
- Voilà le navire qu'il nous faut ! s'écria Phyllis. Il ne reste plus qu'à trouver le capitaine et s'assurer qu'il embarque pour la lointaine Europe. Comme ce serait agréable de naviguer par beau temps sur la mer bleue !
Platon leva le nez de sa botte d'herbe où il était plongé et fit signe à la petite fille de s'approcher. Elle se pencha et l'agneau lui murmura à l'oreille.
- N'y songe pas de partir avec ce bateau là ! C'est un bateau maudit, commandé par un capitaine maudit lui aussi !
- Ha, ha ! ria Phyllis. Encore une histoire à dormir debout ! Les capitaines et les vaisseaux maudits n'existent que dans les livres ou au cinéma. Tu es contrarié parce que tu as peur d'avoir le mal de mer, mais je connais un remède pour ça et dès demain, nous achèterons le nécessaire dans une pharmacie avant d'embarquer.
Puis, se tournant vers le cracheur de feu, elle demanda comment ils allaient rencontrer le capitaine. En entendant cela, un grand homme assis un peu plus loin, se leva et s'approcha d'eux.
- Je n'ai pas pu m'empêcher d'écouter votre conversation, dit-il. Je suis le capitaine de ce navire et j'embarque ce soir à minuit pour la lointaine Europe. Si vous voulez vraiment prendre la mer, je vous emmène avec moi. En échange, vous me tiendrez compagnie car je suis seul et je m'ennuie sur mon navire. Nous bavarderons, nous chanterons et de temps en temps, nous ferons escale pour nous ravitailler jusqu'à la destination finale.
- Comme c'est gentil à vous de nous le proposer ! dit la petite fille. Seulement, il faut d'abord trouver une pharmacie et acheter de quoi éviter la nausée, parce que mon ami Platon n'a pas le pied marin et il risque de tomber malade.Il faudra aussi écrire une lettre à ma maman pour lui donner de mes nouvelles afin qu'elle ne s'inquiète pas, avant de partir.
Ainsi, quelques heures plus tard, équipés de comprimés anti-nausée et mal de mer, le petit chaperon Phyllis, Platon le mouton, et le Cracheur de feu artiste, embarquèrent sur le grand vaisseau du Capitaine qui mit les voiles vers la lointaine Europe.
Mais Platon avait eu raison de se méfier. Car le capitaine du navire sur lequel ils venaient de prendre la mer, n'était autre que le tristement célèbre Hollandais Volant, maudit de ne toucher terre que tous les cent ans.