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enfants - Page 13

  • Le petit Chaperon voit rouge (13)

    Capitaine4.jpgNos héros prirent soin du naufragé. Ils lui donnèrent un petit lit confortable sur le pont inférieur, désinfectèrent et pansèrent ses blessures, lui donnèrent de l'eau à volonté et de une nourriture saine, et se chargèrent de surveiller son sommeil à tour de rôle. Phyllis et Océane voulurent veiller le malade, mais le Capitaine décréta que c'était un travail d'adultes. Bon gré, mal gré, les fillettes n'eurent droit qu'à des brèves visites quotidiennes  pour ne pas fatiguer le malade mais elles envoyaient Platon régulièrement aux nouvelles. Cela dura deux jours et le troisième, enfin, le Capitaine autorisa l'homme à sortir de sa cabine et s'asseoir avec les autres sur le pont afin de profiter du soleil.

    Phyllis brûlait d'impatience. Elle voulait tout savoir sur l'inconnu : qui était-il ? Comment s'était-il retrouvé seul rescapé du naufrage ? Qu'étaient devenus ses compagnons ? Elle refréna sa curiosité cependant, car elle remarqua le visage pâle du voyageur et sa difficulté à se déplacer sans l'appui solide du Capitaine et du Cracheur de feu.

    - Il n'a pas l'air de recouvrer vite ses forces, confia Phyllis à Platon et à Océane. A mon avis, il faudra le transporter à l'hôpital le plus proche.

    - Mais nous sommes en plein océan ! s'exclama Platon. Où peut-on trouver d'hôpital ?

    - Le Capitaine doit le savoir, affirma confiant le petit Chaperon. Il suffit de faire cap vers le littoral le plus proche et de confier notre malade aux soins de médecins et d'infirmière expérimentés.

    Décidée de mettre son plan à exécution, Phyllis et ses amis trouvèrent le Capitaine assis devant son bureau en train d'écrire dans le journal de bord. Dès qu'ils eurent expliqué les raisons de leurs visite ils fixèrent avec espoir le Capitaine. Ce Capitaine qui écouta  attentivement, pâlit.

    - Cela est impossible ! finit-il par murmurer. Nous sommes à des lieues de toute terre. Nous ne pouvons rien faire d'autre à part souhaiter qu'il recouvre ses forces petit à petit. 3.jpg

    Plus d'une semaine s'était écoulée depuis que le Cracheur de feu et le Capitaine avaient secouru l'inconnu, lorsqu'un soir, pendant que la compagnie savourait le coucher du soleil sur le pont, l'étranger vint les rejoindre. Il était encore un peu faible, mais il marchait sans aide et son visage semblait reposé. Il s'installa et son regard fixa l'horizon qui se teintait de magnifiques couleurs dorées.

    - Je suis contente de savoir que vous allez mieux, monsieur.  Je ne veux pas être indiscrète,  dit Phyllis, mais, je ne peux m'empêcher de vous poser la question qui me vient à l'esprit comme à tous ceux présents sur ce navire. Qui êtes vous ?

    L'inconnu sourit faiblement à la petite fille et une sorte de nostalgie voila son regard.  Après un silence il dit.

    - Je  ne suis qu'un pauvre pêcheur fou ! J'étais à la poursuite de ma bien aimée* lorsque la tempête m'éloigna de la côte et me jeta sur les récifs me laissant pour mort. Sans votre aide, s'en était fait de moi !

     

    *Oscar Wilde, Le Pêcheur et son âme.

     

  • Le Petit Chaperon voit rouge (11)

    669_miroir.jpg C'était un vrai bonheur de constater combien Phyllis et Océane s'entendaient bien. Physiquement, les deux fillettes étaient comme le jour et la nuit : les cheveux de Phyllis avaient la couleur d'un miel dorée et descendaient en cascade bouclée sur ses épaules. Ses lèvres rose souriaient et illuminaient ses beaux yeux violets. Océane était brune. Sa peau mâte laissait voir qu'elle venaient d'un pays innondé de soleil. Elle fixait ses interlocuteurs une interrogation dans ses grands yeux noirs. Elles passaient des heures à se raconter leurs expériances solitaires et à comparer leurs souvenirs mutuels. Elles apprenaient à s'apprivoiser. Parfois elle s'amusaient à jouer à cache-cache ou à la corde à sauter et Platon faisait toujours partie de leurs jeux. Une seule ombre ternissait parfois ce tableau idyllique. Lorsque Phyllis évoquer le souvenir de sa maman, le regard d'Océane s'emplissait de tristesse car elle n'avait gardé aucun souvenir de sa propre mère. Le petit Chaperon, perspicace, compris la douleur de son amie et prit la décision d'éviter le sujet.

    Le temps passait agréablement pour nos amis et rien ne semblait perturber leur progression vers la destination finale de leur voyage, quand une belle après midi lumineuse, le miroir enchanté se troubla et parla alors que personne ne le faisait attention à lui.

    - Phyllis, va prévenir le capitaine, j'ai à lui parler.

    La fillette quitta ses jeux avec ses amis et se dirigea vers la cabine du Capitaine. Elle frappa à la porte et l'ouvrit après qu'une voix l'invita à entrer.

    - Capitaine, le miroir enchanté m'envoie vous prévenir. Il veut vous parler.

    Le Capitaine s'étonna de la nouvelle mais sans rien dire, suivit Phyllis sur le pont où le miroir tenait compagnie à Océane et à Platon, pendant que le Cracheur de feu s'entraînait à des nouveaux tours pour son spéctacle.

    - Qu'attendez-vous de moi, miroir ? Demanda le Capitaine une fois devant l'objet.

    - Je vous ai demandé de venir car j'ai vu dans mes profondeurs, à sept lieues d'ici où nous naviguons, accroché à des roches, les restes d'une épave.

    - Il n'est pas rare de rencontrer des épaves dans ces mers, répondit le Capitaine. Ce sont des eaux dangereuses et si un navire se fait piéger par une tempête il risque d'échouer.

    - Je le sais très bien, dit le miroir. Mais cette fois-ci c'est différent ! Près de l'épave, accroché à la coque déchiquetée gît un corps qui nécessite de l'aide.ile.jpg

    Phyllis qui ne perdit pas une miette de la conversation intervint.

    - Il faut le sauver Capitaine !

    Tout le monde acquiesça et le miroir précisa.

    - Il faut faire vite Capitaine, sinon, la personne échouée sur ce rocher, elle ne pourra pas survivre. La nuit tombe rapidement. Si vous voulez agir, il faut le faire tant que le soleil est encore visible.

    Sans plus attendre, sous le commandement du Capitaine, chacun voulut prendre part à l'intervention et le grand Vaisseau se dirigea vers le lieu du naufrage.

     

  • Le Petit Chaperon voit rouge (10)

    Capitaine 3.jpgAprès le sauvetage de Platon et de la petite fille océane, le Capitaine fut célébré en héros par les compagnons. Son expérience de la mer et des éléments permirent un tour de force admirable et Phyllis ne tarissait pas d'éloges à son sujet.

    - C'est le Capitaine qui a eu l'idée de revenir sur le point d'impact. Il a pu calculer les circonstances, les conditions nécessaires à l'intervention.

    - Tu minimise ma contribution, jeune fille ! s'indigna le miroir enchanté. Qui, selon vous, a permis de localiser l'île océane ? Qui donna les longitude et latitude exactes ? Qui rapporta les conditions météorologiques appropriées au Capitaine lors de la disparition de l'agneau ?

    - Oh ! Joli miroir, ne vous fâchez donc pas ! répliqua Phyllis. Je ne mets pas en doute la précieuses contribution qui fut la votre à un moment aussi primordial ; mais vous devez admettre que le navire est un bâtiment lourd et peu maniable.  De plus, il  a fallu calculer avec précision  notre position sur les cartes, sonder le fond avant l'abordage pour ne pas ensabler le vaisseau ! Si le Capitaine avait manqué de sang froid au moment de la manoeuvre, nous serions tous écrasés sur les récifs et les écueils qui entourent l'île.

    - Nous aurions tous tapissé les fonds marins à l'heure qu'il est, ricana le Cracheur de feu. Adieu lointaine Europe, adieu spectacles et tournées musicales.

    Le miroir se rangea aux arguments de la petite fille mais considéra à part lui-même qu'on dépréciait  son travail et resta boudeur.

    Le petit Chaperon rouge toute à la joie de retrouver Platon avait oublié les règles de la stricte politesse. Elle s'empressa d'y rémédier et souhaita la bienvenue à bord de la petite rescapée qui devait avoir environ son âge et lui présenta ses compagnons. Puis, curieuse de connaître mieux la jeune fille, Phyllis lui demanda.

    -  Au fait, comment t'appelles-tu ?

    Un hésitation se lut sur le visage de la visiteuse et elle sembla embarassée.

    L'enfant.jpg- Je...euh, il ne me semble pas l'avoir déjà entendu, dit-elle en rougissant. C'est que...j'ai toujours vécue seule sur mon île. Personne ne venait jamais, et personne ne m'appela par mon prénom. Du moins, si c'est le cas, je ne garde aucun souvenir.

    - Ne t'en fais pas, s'écria Phyllis. Nous te trouverons un joli prénom, qu'il te siéra à merveille. Hum, d'ailleurs j'ai une idée. Puisque nous t'avons recueillie en Haute-mer, tu es une fille océane. Nous te nommerons Océane !

    La petite fille trouva le prénom d'une belle sonorité et le répéta à plusieurs reprises.

    - Océane, murmura-t-elle. Cela me plaît. C'est comme le bruissement  des vagues, le ressac des écumes  qui s'éteignent sur le sable.

    Ainsi, Océane fut baptisée en souvenir de son île. Le soir-même, nos compagnons organisèrent une fête en son honneur, et le Cracheur de feu donna une performance exceptionnelle et l'on pouvait voir à des lieues à la ronde les volutes orangées s'élever dans le ciel de velours.

  • Le Petit Chaperon voit rouge (5)

    Le grand navire voguait sur les vagues, depuis un long moment déjà. Le soleil laissait percer à l'est un halo de lumière alors qu'à l'ouest la nuit ne laissait voir que quelques étoiles. Phyllis qui s'était installée dans une cabine avec Platon, dormait poings fermés d'un sommeil heureux et sans rêves. Cependant, Platon n'avait pas fermé l'oeil et tournait encore et encore dans un panier que la petite fille avait installé au pieds de son lit. L'agneau ne savait pas s'il fallait attendre le jour ou s'il fallait réveiller son amie. Durant des heures il avait ouvert grand ses oreilles pour entendre les bruits du navire et il lui avait semblé que quelqu'un soupirait dans le noir. Ne tenant plus, il se leva et tira sur les couvertures de Phyllis et, de son museau, il poussa la petite fille à se réveiller.

    - Phyllis ! Phyllis ! chuchota-t-il. Réveille-toi ! Il y a quelqu'un dans la cabine. Phyllis je t'en prie, c'est urgent !

    Tant de tintamarre finit par sortir notre Chaperon de son sommeil.

    - Enfin, Platon, que se passe-t-il ? Tu ne dors pas ? Tu n'est pas fatigué ?

    - Comment puis-je dormir alors qu'une personne ou peut-être une créature dangereuse n'arrête pas de soupirer dans le noir ?

    - Tu as dû rêver, Platon. Il n'y a personne ici à part nous !

    Le petit chaperon n'avait pas fini de prononcer ses paroles lorsqu'un soupir profond semblant venir d'un minuscule placard se fit entendre. La petite fille et l'agneau restèrent immobiles comme pétrifiés sur place. Puis, Phyllis d'un geste très déterminé, sauta du lit, alluma sa lampe torche et ouvrit le placard. Au début, elle ne vit rien de particulier et s'aprêtait à refermer les portes et retourner au lit quand un autre soupir beaucoup plus proche résonna de nouveau. Platon poussa un petit bêlement de surprise et de frayeur mais Phyllis décidée à en finir avec les peurs stupides de l'animal, regarda plus attentivement le fond du placard et dans une fente bien dissimulée par l'ombre, découvrit une araignée accrochée à sa toile. Délicatement, elle tira sur la toile et demanda : "C'est toi qui soupire ma petite araignée ? Il faut que tu  arrêtes tout de suite, parce que mon ami Platon a très peur et ne peut pas fermer l'oeil. Quel idée saugrenue pour une araignée de soupirer !

    toile-araignee-perles-rosee_5600.jpg- Hélàs, répondit l'araignée. Je ne suis pour rien dans tout ça. Moi, je tisse ma toile sans gêner personne. Celui qui soupire se trouve sur le pont inférieur, exactement sous mon placard. D'ailleurs vous n'êtes pas seuls à ne pas pouvoir dormir. Figurez vous, que toutes les nuits, après minuit, cette personne se met à pleurer et à soupirer.

    - Mais, qui est-ce ?

    - Je ne sais pas; soupira à son tour l'araignée. Chaque fois que j'essaie de voir de qui il s'agit, les soupirs et les pleurs cessent.

    - Il faut vite tirer au clair ce mystère, décida Phyllis. J'irai sur le pont inférieur et je trouverai cette personne. Peut-être qu'elle a besoin de notre aide. Platon, viens avec moi.

    - Ah ! non, il n'est pas question que tu y ailles ou que je t'accompagne. Il faut vite trouver un moyen de prévenir le Cracheur de feu ou le Capitaine.

    - Sottises ! dit résolument Phyllis. Si tu ne veux pas venir, j'irai seule, et je découvrirai d'où proviennent ces soupirs.

    Ainsi, armée de sa lampe torche et d'un canif, la petite fille, accompagnée d'un Platon  craintif et tremblotant, déscendit l'étroite échelle qui menait au pont inférieur. Malgré sa peur, Platon insista pour accompagner son amie, et tout les deux finirent par découvrir sous le placard de la chambre une petite pièce qui avait l'aspect d'un débaras. Ils commencèrent par chercher dans deux grandes boîtes mais il n'y avait rien d'intéressant. Ensuite ils dégagèrent sous un tas de poussière un coffre en bois. Phyllis le tira de là, l'épousseta et l'ouvrit à l'aide de son canif. Quelle ne fut pas sa surprise de découvrir sur un fond de velours noir un miroir brillant comme neuf. miroir_verre_barock.jpg

    - Quel joli objet ! Je me demande à qui il appartient, dit-elle à Platon. Crois-tu qu'on pourrait le garder ?

    - Pour l'amour de Dieu Phyllis ! Que ferions-nous d'un miroir ? Dépêchons nous de trouver qui soupire et retournons vite dans notre cabine. Je n'ai plus le courage de rester ici. Je crois que mon coeur va s'arrêter de battre !

    Il n'avait pas terminé ses paroles qu'un long soupir l'interrompit. De frayeur, Phyllis faillit laisser tomber le miroir.

    - Hé ! Doucement petite fille ! Tu risques de me briser en mille morceaux ! J'ai beau être enchanté, je ne pourrais pas me rafistoler si l'on me casse !

    - Un miroir enchanté ? Comme celui de Blanche Neige ? le questionna Phyllis qui fut vite remise de sa surprise.

    - Blanche Neige ? répondit le Miroir. Je n'ai pas eu l'honneur de faire sa connaissance. Je suis le Miroir que la Bête offrit à Belle afin qu'elle puisse la surveiller et je peux te montrer tout ce que tu désires.

    - Tout ? Alors... Ma maman aussi ? Hésita Phyllis, car elle avait beau aimer l'aventure, elle aimait sa maman plus que tout au monde et de temps en temps, elle était nostalgique.

    - Quelle question ! Évidemment que je le puis !

    Le miroir se troubla quelques secondes avant de laisser paraître devant les yeux ébahis de la petite fille un lit dans une  chambre qu'elle reconnaissait bien, dans lequel sa maman dormait. Le petit Chaperon essuya une larme furtive.

    - Devenons amis, cher miroir, proposa Phyllis d'une voix émue. Je vous garderais avec nous et vous ne souffrirez plus de solitude. J'imagine que c'est vous qui soupirez et ne laissez personne dormir ?

    - J'accepte votre proposition. Je désespérai que quelqu'un me trouve enfermé dans cette boîte malodorante qu'on m'avait enfermé !

    - Mais comment vous vous êtes trouvé là dedans ? ne put se retenir Phyllis bien que sa maman lui avait souvent répété que la curiosité  est un vilain défaut.

    - La faute à Belle, qui m'emporta chez son père lorsqu'elle alla lui rendre visite. Ses soeurs profitèrent de l'occasion et me vendirent à un marchand de passage qui me vendit à son tour au Capitaine. Mais mécontant, ce dernier m'enferma ici pour ne plus rien voir de son passé.

    - Croyez-vous qu'il accepterait de vous laissez en ma possession ? Vous le voulez, n'est-ce pas ?

    - Nous verrons  ! répondit le miroir. Seulement, de temps en temps, je vous demanderez de m'autoriser à voir mon Maître et Belle, car ils étaient gentils avec moi et ils me manquent.

    Phyllis et Platon regagnèrent leur cabine et tôt le matin, la petite fillette raconta ce qui s'était passé et demanda au Capitaine si elle pouvait garder le miroir. Il n'opposa pas d'objection. Ainsi, un nouveau compagnon vint s'ajouter à notre petite bande.

    Pendant ce temps, le Vaisseau qui se nommait Espoir poursuivait sa route vers les mers océanes.