Perchés dans les branches du mûrier, les enfants-vers écoutaient fascinés le vieux Bombyx raconter l'histoire de Phyllis le petit Chaperon rouge quand à ce point de l'aventure, un tout petit vers, interrompit le conteur.
- Grand père, dit-il. Il me sembble que je connais cette histoire ! J'ai vu un film il n'y a pas si longtemps, avec un hobbit qui transportait un anneau autour du cou. Ce ne serait pas celui là ?
Les autres enfants-vers, se mirent tous à crier qu'eux aussi avaient vu le film en question et ils se souvenaient du gentil petit hobbit et de ses aventures.
- Pas si vite ! les interrompit le vieux Bombyx. Sauf le respect que j'ai pour lui, tous les anneaux ne sont pas celui deTolkien ! Je connais bien l'histoire de ce hobbit. Il vivait dans des lointaines contrées lorsque le magicien Gandalf le chargea de faire détruire l'anneau. Mais notre histoire n'a rien à voir avec celle du hobbit. Si vous me laissiez poursuivre vous le sauriez.
Les petits enfants-vers du mûrier se turent et le Bombyx reprit son récit un peu contrarié car il n'aimait pas être interrompu.
Le lendemain matin, Phyllis se réveilla de bonne heure et se mit à écrire une longue lettre à sa maman qu'elle avait négligé à cause des événéments. Dans sa lettre, elle évita de trop l'inquiéter mais elle lui raconta sa rencontre avec l'étrange individu enturbané que le Capitaine avait enfermé dans une des cabines sur le pont inférieur.
- J'aimerai connaître cet homme, pensa-t-elle. Peut-être qu'il a un talent particulier, et il pourrait faire partie de notre troupe.
Sans plus attendre, le petit Chaperon se dirigea vers la cabine de l'inconnu et frappa doucement à sa porte avant d'entrer. Une fois à l'intérieur, elle constata que la cabine était vide. L'individu n'y était pas.
- Il est probablement avec le Capitaine et le Cracheur de feu, se dit-elle.
Elle s'aprêtait à ressortir lorsque son regard surprit sur le sol, à moitié caché sous la couchette, un papier froissé. Elle le récupéra et lissa la feuille. Elle put lire avec surprise le message suivant : "prends le miroir".
- Le miroir ? Est-ce que l'individu veut me voler le miroir enchanté ? se demanda Phyllis. Il faut vite que je vérifie.
Elle retourna dans sa cabine, chercha dans ses affaires mais ne trouva rien. Etonnée, elle alla chez le Cracheur de feu, mais son ami lui certifia qu'il n'avait pas vu le miroir depuis qu'ils l'avaient utilisé pour la sécourir. Chez le Capitaine le scénario fut le même. Partout où l'on chercha, le miroir enchanté fut introuvable.
- C'est le ravisseur qui me l'a volé ! dit Phyllis au Capitaine. Maintenant je ne pourrais plus voir ma maman !
- Nous l'avons probablement oublié dans la maison où tu étais retenue prisonnière, la consola le Capitaine. J'irai le chercher moi-même. Reste ici. Je reviendrai dans moins d'une heure. Pendant mon absence, deux hommes iront à la recherche du ravisseur. Nous avons négligé de l'attacher solidement et il a pu s'enfuir.
Quelque temps plus tard, le Capitaine revint bredouille. Il fallait admettre, au grand désarroi de Phyllis, que le ravisseur avait volé le miroir enchanté.
Les heures passèrent lentement. Phyllis et Océane s'enfermèrent dans leur cabine en attendant que le Capitaine et ses hommes trouvent le voleur. Les deux fillettes étaient pérsuadées que désormais elles ne verraient plus l'objet magique. Mais c'était sans compter sur l'éfficacité des marins. Car dans l'après midi, une des hommes de l'équipage, monta à bord, traînant devant lui le coupable.
- Je vous demande pardon ! se lamentait l'homme. Je ne savais pas à quoi il pouvait servir ce miroir. Ça faisait partie de mon contrat !
- Tais-toi, brigand ! cria le Capitaine. Nous te livrerons aux autorités. L'enlèvement est un crime. S'en est fait de toi !
Sans autre forme de procès, l'individu ligoté fut conduit au commissariat par deux hommes.
- Il est dangereux de rester plus longtemps dans ce port, dit le Capitaine à ses amis. Il faut reprendre la mer et poursuivre notre route vers l'Europe. La Sirène est devenue notre énnemi. Il serait imprudent de rester plus longtemps à cet endroit. Au coucher du soleil, nous mettrons les voiles.
C'est ainsi que l'équipage, vit s'éloigner les côtes baignées dans les lumières chaudes du coucher. Une tristesse assombrissait les visages des hommes, car ils ne savaient pas s'ils allaient retoucher terre de sitôt ; ils ne pouvaient dire si la malédiction qui les retenait prisonniers entre ciel et eaux serait levée à nouveau. Ils agitèrent la main vers un spectateur invisible restèrent à contempler la ville jusqu'à ce qu'elle s'efface dans les brumes du soir.